dimanche 24 octobre 2010

Les chemins se croisent... mais ne s'effacent pas

Haïti, 12 janvier 2010 et les jours suivants.

L’enfant
Assis sur les marches de l’église,
Les coudes sur les genoux,
La tête dans les mains
Les yeux dans le vague…
Parfois l’enfant se regarde dans un bout de miroir posé entre ses pieds
Il est le seul vivant, et ne veut pas se perdre de vue.
Derrière lui il n’y a plus d’église.

L’odeur lui brouille la vue
Il sait déjà qu’il ne pourra jamais oublier l’odeur
Il suce un petit caillou pour tromper la soif.
S’il n’avait pas si soif il pourrait respirer par la bouche
Et mieux supporter la puanteur.
Il ne voulait pas aller à l’école
Il a espéré que l’école s’écroulerait dans la nuit.
L’école est restée debout
C’est tout le reste qui est à terre.
L’enfant ne pleure pas.
Il espère que personne ne saura jamais
Qu’il a souhaité voir l’école s’écrouler.
Il a peur de la force de son désir.
Il se dit aussi qu’il est trop petit
Pour être responsable d’un tel désastre.

Il tremble
Non, la terre tremble de nouveau
De toute la force des ses poumons l’enfant crie :
« ça suffit, tout est déjà cassé, ça suffit. Arrête ! »
Il tape du pied sur le sol qui se calme
L’enfant tremble de colère.

L’enfant pleure, il a faim, il a soif.
Là à quelques mètres de lui sa maison au sol.
Sous un tas de gravats :
son père, sa mère, ses frères, ses sœurs, sa tante, ses cousins, et sa grand-mère.

Un homme s’approche
s’assied à son côté
mets son bras autour des épaules de l’enfant seul
l’homme ne dit rien
il cherche au fond de son cœur ravagé de sa propre tristesse
un sourire d’espérance à offrir à l’enfant.
C’est tout ce qu’il a aujourd’hui.
Et dans ce sourire l’enfant entrevoit demain,
Cesse de trembler, de pleurer,
Suce le petit caillou pour tromper sa soif
Et se blottit contre cet homme qui lui sourit infiniment
L’enfant parle de la maison en face d’eux
et sous ce tas de gravats
son père, sa mère, ses frères, ses sœurs, sa tante, ses cousins, sa grand-mère
et sa petit voiture rouge qu’il aimait tant.


Par fidélité, par hasard, par amour, par espoir... lorsque se croisent les chemins. Il y a soudain tant de monde au carrefour. Je devrais ouvrir là une buvette, et offrir à ces amis d'hier et à ceux de demain de quoi les rassasier, de quoi les faire rire. Les rires des amis sont tellement chauds. Tout ceci peut vous paraitre allusif. Mais ils se reconnaitront. Je l'espère .

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