dimanche 18 mars 2012

Les Sept Vies du Chat à Neuf Queues.



« Ah ! te voilà, minette ! »

Vautrée sur l’herbe, maternité épanouie. Et vas-y que je te lèche, et vas-y que je ronronne, et vas-y que je les couve mes cinq petits rejetons tout frais de la nuit.
Il se laisse tomber sur la souche où la chatte est allée se cacher pour mettre bas. Dégoûté.
« Et voilà, ça recommence avec une régularité lunaire. Elles m’épuisent ces femelles et leur cycle, ce temps féminin, rond, hier, demain. L’exigence du cycle des femmes. Comment voulez-vous qu’elles puissent ne pas nous freiner dans nos luttes en avant ? »
Lui ne pourrait même pas bâillonner un chaton à l’éther, préférant que d’autres se chargent de cette corvée. Etant même prêt à les remercier. Pas de conflit. Jamais. Laisser bouillir son énervement mais ne pas soulever le couvercle. Le temps apprend cette fausse patience qui consiste à laisser courir. Attendre et si l’orage passe sans éclater alors il peut dire, fanfaron « Tu vois, ça ne valait pas le coup ». Se taire, son arme d’attaque. Elle aurait dû apprendre cela au lieu de le questionner. C’est idiot de poser les questions dont on connaît les réponses. Mais était-ce la bonne question ? Enfin, il avait dû répondre « Rien ». Elle ne pouvait rien lui donner dont il ait envie.

Il regarde la chatte qui lèche ses cinq petits. Maligne la chatte, depuis le temps, elle a compris qu’on lui dérobe ses portées à peine nées pour ne jamais les lui rendre. Alors maintenant, elle se cache pour donner la vie et ne montre sa progéniture que quand il semble trop tard pour que l'on lui enlève. Lui il ne peut pas. Tout juste capable de solliciter un copain pour la corvée morbide. Et surtout quitter le périmètre assassin le temps des hostilités.
Il regarde la tigresse, les cinq boules de poils. Secs.
Tiens, le père est le rouquin du voisin, pas de doute. Demander au voisin, après tout il a sa part de responsabilité dans l’affaire : « Ton chat… Ma chatte n’était pas consentante, c’est un abus, il faut réparer… »
Il entend le voisin répondre : « A-t-on jamais vu un chat lever ne serait qu’un sourcil sur une chatte qui ne demande rien ? »
« Oui, bon, c’est vrai. Mais tout de même ! »
« T’avais qu’à lui donner la pilule à ta chatte ! »
« Et toi castrer ton gros matou roux, quand on ne sait pas tenir ses fauves en cage… »
La conversation dégénérait vite. Du temps de perdu.
La chatte le regarde. Comprend-elle qu’elle a sauvé ces cinq-là ?
Sans l’étouffer, noyer le chaton. Etre capable de le regarder dans les yeux jusqu’au bout. Il faut pouvoir noyer un chaton sans l’étouffer avant, le regarder dans les yeux en le plongeant lentement dans l’eau, tout en le maintenant bien fermement.
Il est incapable de noyer un chaton mais il peut dire à une femme aimante qu’il veut quitter : « Mais nous resterons amis si tu veux »
Une des sept vies du chat à neuf queues... La suite à paraître bientôt chez Ed. (en cours)
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